2) LES REACTIONS
Lors de la communication de la Commission européenne sur l'avenir de la PAC, les députés du Parlement européen n'ont pas manqué cette occasion de mettre en avant leurs points de vue.
Citons d'abord l'allemand Albert Deß (du Parti populaire européen, PPE), qui était également le rapporteur du Parlement européen lors du rapport sur la PAC à l'horizon de 2020, voté le 31 mai 2011. Le communiqué de Monsieur Deß, publié suite à la présentation de la Commission, promet que "le Parlement européen luttera pour une politique agricole européenne qui soit forte et moins bureaucratique". Ainsi, il souhaite que les agriculteurs "puissent passer plus de temps auprès de leurs champs et leurs animaux et non derrière leurs bureaux". Afin d'être plus écologiques, plus performantes et plus justes, les aides agricoles devraient être maintenues et mieux distribuées, toujours dans le système des deux piliers. Albert Deß exclut toutefois le recours excessif aux jachères, qui ne serait pas, selon lui, en phase avec l'augmentation de la demande mondiale des produits agricoles.
Deçu de ces propositions, le portugais Luis Manuel Capoulas Santos (Socialistes et Démocrates, S&D) a déclaré : "La proposition de la Commission est bien de loin mais loin d'être bien". Pour lui, celle-ci n'est pas à la hauteur de ce que la commission parlementaire chargée de l'agriculture avait proposé - notamment en matière du verdissement, la réduction de la bureaucratie et la régulation du marché. En effet, Monsieur Capoulas Santos est très actif dans cette commission parlementaire, où il a, entre autres, accompagné, en tant que rapporteur, l'avis pour le budget agricole 2012. C'est un sujet dont la commission parlementaire des budgets est chargée en première ligne, mais la commission de l'agriculture est toutefois saisie pour avis, pour ce qui concerne le budget agricole. Ainsi, Monsieur Capoulas Santos a souligné qu'il était important de maintenir un budget agricole conséquent, afin de pouvoir répondre aux enjeux actuels. Il a également insisté sur la nécessité de faire plus d'efforts pour faire converger les aides que reçoivent les anciens et les nouveaux Etats-membres - un sujet qu'il avait déjà mis en avant lors des débuts du débat de la réforme.
Pour l'écossais George Lyon (Alliance des démocrates et des libéraux pour l'Europe, ALDE), "les propositions pour la PAC passent à côté des vrais enjeux". Malgré un certain nombre de points positifs, il fait valoir de lourdes critiques, concernant entre autres le verdissement qui ne serait pas opérationnel (mais plutôt un frein à la compétitivité) et l'obligation de laisser inexploité 7% des terres. Ceci dit, Monsieur Lyon note que plusieurs améliorations ont été apportées pour les agriculteurs écossais. Très impliqué dans le débat sur la PAC, George Lyon a figuré, en 2010, comme rapporteur parlementaire du rapport sur l'avenir de la PAC après 2013, et il a contribué à plusieurs reprises au débat public.
Martin Häusling, porte-parole en matière agricole des Verts au Parlement européen, se dit, lui aussi, déçu des propositions dévoilées par la Commission, d'autant plus qu'il avait accueilli de façon très chaleureuse la première communication en 2010. Aujourd'hui, Monsieur Häusling déplore une "coalition récalcitrante" (dirigée avant tout, selon lui, par son pays natal, l'Allemagne, et les lobbies agricoles) : celle-ci aurait, durant une année, estompé les ambitions initiales de la Commission. Selon le député Vert, les propositions environnementales ne sont pas à la hauteur de l'urgence, et la priorité mise sur l'innovation et la recherche n'est pas automatiquement bénéfique pour l'environnement, car elle pourrait aussi entraîner une intensification des impacts négatifs. Récemment, Martin Häusling était le rapporteur parlementaire sur l'importance de la production et des labels biologiques, et des protéines végétales pour une politique agricole européenne durable.
En ce qui concerne les coopératives et organisations agricoles, leurs réactions sont hétérogènes, tout comme leurs perceptions de l'agriculture. En Irlande, l'Irish Farmers' Association (IFA) est opposée aux propositions de la Commission, car le paiements fixes pourraient réduire sensiblement les revenus agricoles irlandais, selon l'IFA. En général, les propositions seraient "très négatives pour l'agriculture irlandaise et ses agriculteurs actifs". De même, le ministre irlandais de l'agriculture, Simon Coveney, s'est dit déterminé de lutter pour le maintien des aides perçues par l'Irlande.
Par contre, comme le rappelle le ministère polonais de l'agriculture, les anciens Etats-membres sont, en général, favorable au système actuel des aides, tandis que les nouveaux Etats-membres souhaitent accroître leur part du gâteau.
Face à cette multiplicité de critiques, Dacian Ciolos, Commissaire à l'agriculture et au développement rural, a souligné, lors de ces conférences de presse et devant les associations et le parlement, la nécessité de trouver un compromis (par exemple ici, au sujet de la Roumanie). C'est une tâche difficile lorsqu'il s'agit d'un domaine si controversé, d'autant plus que c'est la première fois que l'on discute d'une réforme de la PAC sans connaître le budget de la politique agricole, dont les négociations sont toujours en cours.
Dacian Ciolos, commissaire à l'agriculture, et Marek Sawicki, ministre polonais de l'agriculture. Source: Reuters |
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